Eric Schmitt (1999)

P. carthalinica Ketzchoveli, 1959

Tiges de 35-40 cm, glabres et abondamment feuillées. Feuilles bi à triternées, folioles allongées composées de 3 à 5 divisions de 1 à 3 mm de large; segments des feuilles de la base parfois plus larges. Pétales de 4 à 6 cm de long et 3 à 4 cm de large, rouge brillant. Filet des étamines pourpre, anthères jaunes; follicules tomenteux couverts de poils rougeâtres, allongés et étalés à partir du milieu, graines noires brillantes.

Originaire du centre et est de la Géorgie, dans les monts Carthli et Sheralski où se rencontre également P. tenuifolia. Mais Ketzchoveli précise que P. tenuifolia pousse dans les zones dégagées (steppes) tandis que P. carthalinica se rencontre plutôt dans les forêts claires de chênes, en lisière de forêt et au milieu de buissons épineux.

P. carthalinica a été citée dès 1935 par Ketzchoveli, dans un inventaire de plantes poussant en Géorgie. Elle a également été mentionnée en 1948 par Kemularia-Natadze dans la Flore de Géorgie, mais décrite seulement en géorgien.

La description originale par Ketzchoveli (1959) indique que les segments foliaires font 1 à 3 mm de large, ce qui est peu différent de P. tenuifolia; tandis que la photo du spécimen-type montre une plante assez différente par ses segments plus larges plutôt lancéolés et moins nombreux.

Kemularia-Natadze (1961) donne une description assez différente de celle de Ketzchoveli : tiges de 30 à 100 cm, feuilles découpées en segments linéaires étroits de 5 à 10 mm de large. Fleurs de 5-7 cm de diamètre, pourpre foncé; follicules couverts d'une pubescence jaunâtre, rarement rougeâtre, devenant jaune-grisâtre à maturité; graines marron-noir.

Elle suppose que P. carthalinica est peut-être identique à P. biebersteiniana dont la différence majeure est l'aspect grisâtre du feuillage et la présence de poils sous les folioles le long des nervures. Néanmoins P. carthalinica nécessite des observations supplémentaires dans ses conditions naturelles de développement pour être réellement différenciée de P. biebersteiniana; aussi elle reste reconnue comme une espèce distincte.

Paeonia tenuifolia a été mentionnée pour la première fois en 1757 par Zinn, dans le catalogue du Jardin Botanique de Göttingen. Elle était alors appelée Paeonia laciniis foliorum linearibus. Linné (1759) l'a seulement nommée P. tenuifolia, foliolis linearibus dans la 10e édition du Systema Naturœ et l'a enfin décrite en 1762 sous son appellation actuelle. Il citait en référence le nom donné par Zinn et précisait qu'elle est originaire d'Ukraine. Par sa morphologie particulière, Linné considérait presque cette espèce comme étant issue du croisement entre une pivoine et l'adonis des Appenins (Adonis vernalis).

Elle apparaît encore sous le nom de Paeonia foliis linearibus multipartitis, donné par Gmelin en 1769.

Paeonia tenuifolia est une espèce de morphologie très variable. On peut en effet observer des plantes avec un feuillage très ample ou relativement compact, avec des segments foliaires de moins de 1 mm de large à près de 3 mm. La hauteur des plantes peut varier de 20 cm à 50 cm. Certains sujets ont même tendance à être stolonifères.

Schipczinski (1937) et Nyàràdy (1953) indiquent que cette espèce peut rarement produire deux fleurs sur une même tige. Rieck (1993) mentionne ce même caractère pour P. lithophila mais affirme ne l'avoir jamais observé. Les plantes observées dans les jardins sont toujours uniflores.

Cette variabilité est visible dans les jardins et se confirme également dans la nature où, dans une même population, se rencontrent des formes différentes dont certaines ont été décrites comme des espèces distinctes. Ainsi, P. lithophila semble n'être qu'une forme miniature de P. tenuifolia accentuée par des conditions écologiques xérophytes. La forme parviflora mentionnée par Nyàràdy semble également très similaire à P. lithophila.

P. biebersteiniana considérée comme endémique, est disséminée dans l'ensemble de l'aire de répartition de P. tenuifolia. P. cathalinica ne semble pas en être différente.

Borodin (1985) et Takhtajan (1988) incluent P. biebersteiniana, P. carthalinica et P. lithophila dans P. tenuifolia. Punina (1987-1989) ne reconnaît également que P. tenuifolia dans ses études sur les pivoines du Caucase.

P. lithophila et P. biebersteiniana ne sont pas mentionnées dans Flora Europaea alors que Jalas & Suominen (1991) traitent P. biebersteiniana comme simple synonyme de P. tenuifolia.

La principale difficulté pour l'étude de ces espèces vient du fait qu'elles ont été décrites dans des publications peu accessibles et qu'aucun spécimen ne figure dans les herbiers occidentaux (Paris, Kew...). Les premières informations ont commencé à être diffusées par Ray Cooper (1988) dans une réactualisation taxinomique de la monographie de Stern, à l'attention des amateurs de pivoines du SPIN (Species Peonies International Network) ; puis par Irmtraud Rieck dans un article consacré à P. tenuifolia dans la revue allemande Gartenpraxis.

Des graines de P. lithophila, P. carthalinica et P. tenuifolia subsp. biebersteiniana récoltées dans la nature commencent à être diffusées. Cela permettra de mieux les étudier, sous réserve que ces graines proviennent bien de plantes conformes aux descriptions de ces espèces. Ainsi, les premières observations sur P. lithophila ne montrent aucune différence par rapport à P. tenuifolia.

Paeonia tenuifolia est une espèce basse intéressante pour la rocaille, décorative par son feuillage finement découpé. Il existe également une forme rosé et un cultivar à fleurs très doubles qui fleurit une quinzaine de jours après la forme simple.